Les gorges du Carami


le Caramyle pont romainImpossible de trouver le parking avec le GPS voiture : il a fallu que je demande à un habitant de Tourves. Quand enfin j’y parviens, il est déjà plein. De nombreuses familles ont emmené le pique-nique mais ne vont pas plus loin que le pont de Cassade ou pont romain, probablement situé sur la voie aurélienne. J’ai décidé de faire une boucle en longeant la rivière jusqu’à l’ancien barrage puis en revenant par le GR qui traverse une ancienne carrière de bauxite.

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ruines

Le blog de Fouchepate : très belles photos des gorges à ne pas manquer

Peinture rupestre (photo Vincent Potalino)Le Carami (ou Caramy) prend sa source dans le massif de la Sainte-Baume. Je longe la rive gauche d’abord par un sentier facile : parcours agréable sous la fraicheur des arbres ; devant les ruines de la ferme Rimbert, une famille s’est installée pour le pique-nique ; j’apprendrai à mon retour que c’est sur une des barres calcaires qui la dominent que l’on trouve neuf grottes ornées de peintures rupestres tracées au doigt (voir Expressions graphiques de la préhistoire à nos jours, Ph. Hameau). Merci à Vincent pour la photo d’une de ces peintures. Voir aussi Nature passion : l’homme couché de la photo de Vincent pourrait être celui de la grotte Alain.

caramy-5.jpgAu fur et à mesure de ma progression, le parcours devient plus aventureux : il faut parfois marcher dans l’eau, emprunter une corniche étroite et instable, passer au dessus d’un arbre. Deux fois à mi-parcours, j’ai cru que j’allais être bloquée : j’ai dû traverser la rivière à gué puis continuer sur l’autre rive.  A un autre moment, je n’ai eu d’autre choix que d’escalader les rochers, remonter puis redescendre au bord de l’eau dès que possible. Jusqu’à atteindre l’ancien barrage, je me suis demandée si j’arriverais à mes fins. Ce torrent aux eaux qui vagabondent toute l’année, était déjà canalisé au temps des romains.

rochers avec diaclasesblocs rocheuxles gorges

Une vieille passerelle enjambe la rivière non loin du barrage. C’est par là sans doute que les wagonnets de bauxite devaientanciens rails pour le transport du minerai traverser la rivière depuis Mazaugues pour rejoindre la gare ferroviaire de Tourves  (voir Association les gueules rouges). Le transport se faisait par charrette et parfois par câble aérien. J’ai bien du mal à croire que le Var fut le premier centre mondial pour l’extraction de la bauxite… Non loin de là, l’entrée d’un tunnel d’exploitation est encore visible. Un groupe de jeunes a pris possession de l’unique emplacement au bord de l’eau : c’est par là que je dois chercher le trésor gorges profondes caché par le geocacheur VarVincent. Mais ils ne décampent pas. J’en profite pour aller jusqu’au vieux barrage de la mine, à peine visible derrière les gros blocs de pierre. De petites cascades d’eau se cachent dans les creux. Les parois des gorges ont de curieuses formes bombées, creusées de sillons verticaux causés par la circulation d’eau acidifiée (ce sont des diaclases) qui finit par dissoudre la roche, élargir les diaclases, les séparer en blocs individuels qui s’écroulent dans le lit du Carami.

Quand finalement les jeunes me laisseront la place, il sera trop tard pour que j’entame de longues recherches : mauvaise réception des signaux GPS, lecture trop rapide de la fiche, pas de photo susceptible de m’aider.

Je traverse la rivière pour remonter jusqu’au croisement avec le GR99 ; la terre est franchement rouge et cela me rappelle la latérite en Guyane. Cette roche contient beaucoup d’alumine comme la bauxite.

tracteur-elec-tourves.jpg« La bauxite a été découverte en 1821, près des Baux. C’est une roche sédimentaire composée d’alumine, d’oxyde de fer – d’où sa couleur – et de silice. Elle a été exploitée pour son minerai d’aluminium (4 tonnes de bauxite produisent 1 tonne d’aluminium).  La formation de la bauxite s’est effectuée au cours des temps géologiques, surtout au cours du crétacé alors que régnait un climat tropical. La valeur des bauxites comme minerai d’aluminium dépend de leur teneur en hydrate d’alumine (bauxite rouge). » Ci-contre, aquarelle de Marc A Dubout, extraite du site des Gueules Rouges.

L’exploitation s’est arrêtée progressivement à compter de 1970, l’importation de minerai en provenance de Guinée ou d’Australie et son traitement dans des complexes dits « sur l’eau » se révêlant moins coûteux.

Au fur et à mesure que je m’éloigne de l’emplacement de l’ancienne carrière, le sentier reprend les couleurs habituelles de la pierre. Au loin, je devine la chapelle Saint-Probace, perchée sur « la costa du Gau ». A travers bois, le retour me semble long. Je ne croise qu’un couple pas tout jeune, celui que j’avais rencontré sur l’autre rive et qui effectue la boucle dans l’autre sens.
Je rentrerai avec un « didn’t find it » mais sans déception aucune.

Boucle de mon  itinéraire 10km, 2h50, dénivelé 170m (+ un autre tracé vert d’accès aux gorges depuis le sud) ; celui du site Randonner dans le Var au départ de Mazaugues

Le site Lithothèque : les deux accès

Quelques photos du site Provence Balades

Une autre randonnée décrite dans le topo-guide Le Var à pied… fiche n°16, 9m, 3h

Du col Vieux au col Agnel en Queyras


La D205T part de Molines et rejoint la frontière italienne au col Agnel à 2744m d’altitude, en passant devant les ruines du refuge Napoléon. Après le refuge Agnel1, je me gare sur le parking en bordure de route. Il y a déjà beaucoup de monde. Par petits groupes, les marcheurs se dirigent vers le col vieux.

img_2146.jpgimg_2147.jpgJe commence à m’habituer aux pierres feuilletées, aux montées continues en altitude. img_2149.jpgLe GR98 balisé blanc-rouge, est bien repérable. Il longe le ruisseau de l’Eychassier bordé de tapis de fleurs blanches. Après 45mn j’atteins le col vieux. J’hésite entre descendre jusqu’au lac Foréant, d’un bleu profond presque artificiel, ou monter sur le Pain de sucre malgré la difficulté car j’ai entendu dire que le spectacle panoramique sur le Queyras, le Pic d’Asti et le Monte Viso italien était exceptionnel. J’observe ceux qui y grimpent par le sentier le plus raide et le plus dangereux ; je décide finalement d’y monter en le contournant par la droite. img_2148.jpgSoudain, un cri clair venant d’en haut : « attention ! » Je vois une pierre dégringoler et passer à quelques mètres devant moi. Des voix résonnent de l’inquiétude des randonneurs coincés par le vide impressionnant de chaque côté du sommet. Je continue mon ascension. Second cri. En voulant se défaire d’un « mauvais pas » (au sens propre comme au sens figuré), les randonneurs ont fait chuter à nouveau des pierres qui rebondissent, comme folles, jusqu’en bas de la pente. Je ne sais plus si je dois avancer ou reculer. Le nez en l’air, je guette ce qui se passe ; cris de panique. Pour la troisième fois, plusieurs pierres tombent et éclatent de façon désordonnée chaque fois qu’elles touchent le sol. Au milieu de cette pluie de roches, essayant d’anticiper l’endroit de leur chute, je décide de rebrousser chemin le plus vite possible. Je ne suis qu’à 2958m d’altitude.

 

Les cols placés à des altitudes élevées n’ont jamais empêché les habitants de L’Echalp ou de La Monta de commercer et de communiquer avec ceux de Molines, Fontgillarde, Saint-Véran. Témoins, les sentiers muletiers où se faisait une intense circulation de biens, de bêtes, de personnes. Le cartographe Cassini, nomme « grande route du Piémont », le sentier muletier qui va de Guillestre à La Monta qui a conservé aujourd’hui le même tracé que jadis, réservé aux seuls randonneurs ou aux skieurs de fond.

img_2155.jpgimg_2162.jpgLe Pain de Sucre contraste nettement avec les pentes molles couvertes de moraines. C’est un énorme monolithe du jurassique (entre 180 et 135 millions d’années). Le retour par la frontière Italie-France, est fort fréquentée en ce jour de course cycliste ; à ce sujet, Thierry PERRET écrit : « formidable muraille à 10% de pente moyenne […] Le morceau de bravoure se situe au kilomètre 17,5 … une rampe à plus de img_2166.jpg14% sur 300 m… A noter que cette muraille de neuf kilomètres se situe à une altitude comprise entre 1840 m et 2744 m, ce qui accroît encore l’effort à fournir pour progresser… ». J’ai beaucoup d’admiration pour ces cyclistes.
Un marchand de bonbons s’est installée à la frontière, à 2744m d’altitude. Pendant que les touristes se photographient devant le panneau entre les deux pays, je grimpe jusqu’à la table d’orientation pour voir le fameux mont Viso que je n’ai pu voir depuis le sommet du Pain de Sucre. Certains guides y organisent des visites au coucher du soleil qui, parait-il, laissent un souvenir inoubliable de beauté…
Itinéraire col vieux – col Agnel (6.2km pour le pain de sucre – 3h)
Fiche randonnée du site Queyras.aparcourir.com

img_2182.JPGimg_2211.jpgJe terminerai la journée par la visite de Fort-Queyras. De nombreux panneaux d’informaton numérotés permettent une visite non accompagnée mais qui demeure intéressante. Château-Queyras entre dans l’histoire comme château rattaché au Dauphinois au XIIIème siècle. Au moyen âge, il connaît des heures fastes en recevant dans ses murs les dauphins… Au XVIème siècle, Château-Queyras est la proie des guerres de religion. Au XVIIème siècle, il résiste aux assauts des Protestants mais le village est partiellement détruit. À la suite de cette dernière invasion, Vauban vient inspecter la frontière des Alpes et dresse des projets pour rendre le château inviolable. Il prévoit une large extension de l’enceinte sur le front ouest et dote le fort au nord-est d’une enceinte entièrement nouvelle, avec escarpe, fossé, contrescarpe et demi-lune.
Visite de chateau Queyras à Ville Vieille

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1agnel, d’agnielle ou agnière, quartier fréquenté par les moutons, pâturage à moutons

*** Les dentelles de Montmirail


140_4018.JPGLes dentelles de Montmirail. Un nom évocateur que je voulais associer depuis longtemps à la réalité. C’est chose faite grâce à renard84, geocacheur du Vaucluse qui y a placé deux caches (si vous ne savez pas ce qu’est le geocaching, voir chasse au trésor au barrage Zola dans ce blog). Le chemin démarre à Gigondas, au col du Cayron. Il est couvert de neige mais le froid est sec. Les crêtes calcaires en dents de scie forment des falaises abruptes qui en font un lieu réputé pour les amateurs d’escalade. Nous croisons un coureur à pied qui ne craint ni le froid ni les pierres du chemin.

La météo aujourd’hui à cet endroit :
Avec la température ressentie

140_4046.JPG140_4049.JPGLes dentelles sarrazines sont parfois « trouées ». Je grimpe le sentier balisé de petits ronds bleus en espérant atteindre celles qui sont ajourées (photo à gauche). La montée est raide mais l’impatience me pousse à accélérer. Je découvre la première ouverture, et à travers elle, un coin de paysage encadré comme dans un tableau. Du haut de la seconde, la falaise à pic donne le vertige. Je m’y asseois quelques instants. Un groupe de 15 personnes escaladent le chemin ; âgés de 10 à plus de 60 ans, ces randonneurs sont venus en famille fêter les 60 ans de la grand-mère. Ils pique-niqueront tout en haut des dentelles.

Comment se sont-elles formées ? à la faveur de la faille de Nîmes (fracture de l’écorce terrestre), la masse de sel déposée au fond de la mer il y a 200 millions d’années, remonte par gravité, perfore et rebrousse à la verticale les terrains juste au-dessus : ce sont les Dentelles de Montmirail.

140_4036.JPG 140_4037.JPG 140_4040.JPG

140_4020.JPGA nos pieds, des vignobles au nom évocateur. Située dans le Vaucluse méridional entre Avignon et Bollène, l’appellation « Côtes du Rhône » regroupe plusieurs grands crus qui ont contribué à sa renommée internationale : le Châteauneuf du Pape, le Gigondas et le Vacqueyras. Malheureusement, nous n’avons pas eu le temps de nous arrêter pour déguster.

140_4025.JPG140_4026.JPGEn suivant la crête, au pied des falaises, on arrive assez rapidement à une passe qui permet d’aller sur la face sud des Dentelles, la brèche Floret-Turc. C’est par là qu’on accède à LA curiosité des dentelles dont j’ai entendu parler à plusieurs reprises : la chambre du Turc, ancien poste de gué à 625m d’altitude. Pour vous y rendre, gravissez cette brèche. Une fois passé, en continuant le long du chemin sur la gauche, vous apercevrez la chatière du Turc par laquelle il faut entrer, sans son sac à dos. C’est un boyau dans le roc qui permet le passage d’un côté de la paroi vers l’autre. Si vous y montez par temps de mistral, il faudra vous cramponner à la roche, Buckfast l’assure sans aucune exagération. Pour vous donner une idée plus juste, allez donc voir la vidéo de franky84! GC1PP6C

140_4030.JPGQuand on passe de l’autre côté, une seconde rangée de dentelles apparaissent dans la brume de l’autre côté du vallon. Entre les deux, des vignes bien protégées du mistral. La vision qui s’offre à moi a quelque chose d’irréel, une succession de plans parallèles, de plus en plus estompés jusqu’à l’horizon, comme les livres en relief de mon enfance. C’est un type de paysage surprenant, je n’en ai jamais vu de tel auparavant. Le grand Montmirail y culmine à 525m.

140_4033.JPGMariéton Paul, Journal de route, 2001 : « … nous rentrions à Avignon, par un merveilleux coucher de soleil qui promenait sa lumière sur le Ventoux énorme et le rempart déchiqueté des dentelles de Gigondas »

Proposition de circuit dans les dentelles, 3h, (avec variante vers la falaise ajourée, ajouter +320m en montée)

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Les deux caches de renard84 dans les dentelles (désactivées aujourd’hui) : Au coeur des dentelles, entre deux dentelles