*** Castrum d’Avalone et Grand Puech à Vernègues


Une grande journée en perspective avec l’association Les Amis de Jouques qui propose régulièrement des visites fort intéressantes. Guy T., enfant du pays et Gaëtan C. ancien Conservateur en chef du patrimoine au Service régional de l’archéologie, seront nos guides.

Le rendez-vous est à la chapelle Saint-Symphorien dans le hameau de Cazan. Construite au XIIe siècle, elle est agrandie et réaménagée de façon à pouvoir accueillir tous les pèlerins venant vénérer saint Symphorien. Comme je suis arrivée la première, j’ai le temps de repérer ces curieux piliers de pierre devant la chapelle, liés au pèlerinage qui aurait été introduit en Provence dès le 6e siècle par saint Virgile, archevêque d’Arles, ancien évêque d’Autun. Un splendide bénitier – tridacne géant – fait office de… bénitier.

Le 21 Août se déroule chaque année le pèlerinage de Saint Symphorien. La statue du saint est alors descendue à pied depuis l’église Notre-Dame-de-Lourdes à Vernègues vers la chapelle Saint Symphorien à Cazan [ndlr : où elle est déposée sur le socle de pierre devant la chapelle] […] Il fut décapité dans sa vingtième année.
pelerinagesdefrance.fr

Dès la fin du 15e siècle, le saint est imploré comme saint guérisseur (les béquilles au mur témoignent des voeux en cas d’infirmité) et l’on vient de tous les villages environnants demander la protection de saint Symphorien. C’est le cas de Louise Bory (1763) et Honoré Marius Brillon (né le 07/01/1826 à Marseille), commissaire de police dont l’ex-voto est daté du 21 juillet 1859.

Marié à Blanche Roux à Orgon en 1856, venant d’Eyguières où il habite, il implore le 30 juin 1859 la guérison de son jeune fils Adolphe Théodore (né le 02/04/1857 à Orgon) qui frôle la mort dans la nuit du 30 juin 1859. Il sera exaucé ; vingt ans plus tard, un second fils Marius Adolphe Désiré portera en quatrième prénom Symphorien.

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Le Rocher de Castellas


Le Rocher de Castellas à la Roque d’Anthéron, je l’ai vu de loin plusieurs fois : lors d’une rando dans la chaîne des Côtes, depuis le sentier vigneron de Rognes sans avoir eu envie de m’en approcher : vestiges ténus d’une petite fortification très difficile d’accès selon Daniel Mouton, Le fort et l’éminent. La rocca en Provence depuis le début du Moyen-Age, Le monde alpin et rhodanien, Revue régionale d’ethnologie, n°2-4, 1997, pp.179-186 ; et puis des castellas, on en a vu de plusieurs périodes : Roquemartine deux fois, Féline, Rognac de loin seulement, La Fare. Il y a plus longtemps, pour ma part : la Roche Amère à Volx (04), Forcalqueiret (83), à Puyricard celui du cardinal Grimaldi, etc. André est attiré par cette motte castrale, témoin des premières fortifications médiévales du haut Moyen Âge, ici installée sur  un rocher au toponyme évocateur : le castrum de Rocha Anthorroni de 1351 est devenu la Roque d’Anthéron.

Nous nous sommes garés sur le bord de la route D67a qui relie La Roque d’Anthéron à Lambesc. Une piste large et facile monte doucement vers l’est puis le sentier s’engage sur un sentier en sous-bois parallèle à la piste que je préfère largement, même s’il faut parfois enjamber un arbre tombé au sol. Il rejoint la piste ; 100 m plus loin, nous la quittons pour un autre sentier caillouteux et plutôt raide, bien marqué cependant. Où va-t-on arriver ?

Point de vue depuis le Rocher proche du Castellas

Nous passons par un premier sommet repéré par une borne de granit de l’IGN (456,52m), d’où nous apercevons le Mourre Nègre, sommet du Luberon, la vallée de la Durance et le canal EDF ; nous redescendons par des passages rocheux pas toujours évidents, remontons en direction d’un second sommet sur un rocher en face de celui qui nous intéresse. Par un passage côté est nous nous approchons au plus près – prudence, la chute est proche !

Le rocher de Castellas est une falaise en à pic, creusée de grottes, incliné de notre côté mais infranchissable. Qu’y voyons-nous côté sud ? un mur et côté ouest ? un terrain qui monte en pente douce. Peut-être est-il possible d’accéder au castrum par le milieu de la face ouest où la hauteur est la plus faible (6m tout de même !) selon l’auteur Daniel Mouton, dans Mottes castrales en Provence Les origines de la fortification privée au Moyen-Age, Editions de la Maison des Sciences de l’Homme, Paris, 2008. On voit au zoom une cheminée et des traces d’entailles dans le rocher pouvant servir d’escalier et d’accès au castrum. Mais il faudra d’abord traverser des lieux hostiles et escalader…

Sur la plate-forme en partie haute, un mur en bordure de falaise de 1m70 d’épaisseur conservé sur 6m de long, formé de blocs calcaires bien équarris. La base prend appui dans la pente du rocher 4 m en dessous, sans doute la base d’une tour défendant le site des jets de projectiles depuis la colline voisine. En partie inférieure de cette plate-forme une fosse ovale et profonde a été creusée dans le rocher (citerne ou silo ?).
Au pied du rocher, sur la face nord, un habitat a laissé quelques traces d’ancrage à des poutres, impossible à dater.

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** La Débite et la grotte des Ermites depuis Allauch


Je suis arrivée là pour suivre le chemin de la glace suite à la visite de la glacière de Mimet (restaurée entre 10/2015 et 03/2016) et trouver la grotte des (H)ermites du Clos de Notre Dame des Anges. Cette rando est à la fois physique et digne d’intérêt pour les curieux.

Départ tôt à cause de la chaleur. Sur le chemin de Mimet, nous avons croisé quelques chèvres du Rove en liberté, puis vu le club de tir, et non loin du club de dressage canin, nous avons laissé notre véhicule ; en effet, la piste qui remonte vers le nord sera interdite aux véhicules 500 m plus loin. Tour d’horizon : le Pilon du Roy montre sa face cachée, comme une dent creuse. Sous nos pieds le canal de Provence en souterrain.

Le premier oratoire placé sur le chemin du pélerinage à Notre-Dame-des-Anges au milieu du XVIIIe, a perdu la niche de sa statue ; la base massive de sa construction est identique à ceux qui suivront. Le second placé au niveau du domaine de Saint-Joseph et la ferme Notre-Dame-des-Anges, est maintenu en état depuis des siècles.

En contre-bas, André remarque une petite locomotive posée sur une voie ferrée étroite (type Decauville, à vapeur au XIXe) montant vers le nord (le Tourdre). Utilisée dans les exploitations minières, elle aurait pu permettre l’évacuation du minerai depuis une petite mine de bauxite mais aucune n’est proche ; le propriétaire l’a-t-il utilisé pour son exploitation dans les vignes ? En tant qu’amateur de patrimoine ferroviaire, l’aurait-t-il récupéré d’un parc d’attraction ou d’un collectionneur ?

Avant le carrefour de la citerne de la Débite, il faut obliquer sur un chemin non balisé sur la gauche ; il rétrécit progressivement, longe un champ d’oliviers.

Bientôt sur la droite un ensemble de bâtiments contigus confirme qu’il s’agit bien du lieu de la débite de la glace – découpe et vente – au XVIIe siècle.

Un peu plus loin, l’intersection près de laquelle figurent le puits de la débite et au nord le ragage1 de la débite : les eaux de fonte étaient-elles dirigées vers ce trou près du ruisseau ? Vous pouvez rejoindre facilement la citerne par le sentier au-dessus des bâtiments, là où les mulets devaient probablement décharger leur cargaison.

La glace, produit de luxe convoité au XVIIe, était fabriquée l’hiver sur 10 cm d’épaisseur, dans des bacs de congélation probablement situés au lieu-dit Passe-Gat (voir cadastre napoléonien de 1833), le long du vallat Saint-Joseph, en contre-bas de la glacière. Brisée et transportée jusqu’à la glacière, elle y était emmagasinée jusqu’aux beaux jours.

En juin, brisée à coups de pioche et de masse, elle était chargée la nuit, transportée au petit matin en convoi de mulets par le col Sainte-Anne et le chemin de Marseille, jusqu’au lieu où elle sera débitée et vendue : 4km600 par un chemin caillouteux qui monte continuellement – avec parfois de courtes pentes supérieures à 15% – puis redescend jusqu’au lieu-dit la Débite. Un mulet chargé de 80 à 100kg se déplace à la vitesse de 400m en une heure en montée, et 300 en descente. Environ 2h de déplacement en tenant compte des aléas. Vers 1642 il fallait des muletiers professionnels payés cher pour réaliser cet exploit.

Au niveau bas, plusieurs bâtiments, sans fenêtre, avec une porte étroite et des murs épais pour limiter les échanges avec l’air extérieur ; au milieu un établi étroit sur lequel les ouvriers cassaient la glace ; les petites ouvertures au niveau du sol permettaient l’évacuation des eaux de fonte. L’escalier mène au niveau supérieur, celui du stockage de la glace selon moi. Près des ateliers, le mulet était attaché à un anneau dans l’attente de son départ pour Marseille, par le portail aujourd’hui fermé.

En 1648, Madame de VENEL obtient du Roy de France, le privilège de construire, à elle seule, des glacières en Provence, et de faire vendre et débiter toute la glace qui en sortira.
La fourniture de glace n’étant pas toujours à la hauteur des besoins, à la débite, tout le monde s’y dispute : majordomes, propriétaires de bar, population… ; la police est présente. Si le fermier de la glace ne peut fournir selon le contrat signé, il fait venir la glace de plus loin (Isère, Ventoux)… ou paie une amende.

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