Passons de l’autre côté de la montagne de Vaumuse et changeons de vallée. La montagne de Vaumuse sert de transition entre la vallée des Duyes et celle du Vançon, et entre les Alpes et la Provence ; le paysage est vraiment différent. Pour vous en persuader, revoyez l’article le sommet de Vaumuse. C’est probablement plus facile d’atteindre le sommet de Vaumuse à partir de Vaunavès1 qu’à partir du pont de la reine Jeanne. Un rapide regard sur la carte de Cassini nous confirme que la chapelle Saint-Joseph existait déjà en 1779 en tant qu’ermitage, que les 2 s de la Pérusse2 ont disparu au profit du symbole de la ligature ſ + s → ß, utilisée dans des manuscrits en français dont la carte de Cassini, avant que le s long ne disparaisse complètement dans l’imprimerie vers la fin du xviiie siècle. D’après l’eszett, wikipedia.
Photos de J.-P. Lecomte, en hiver
A Vaunavès, je trouve facilement une place pour me garer. Je n’ai pas pris le sentier qui monte à la chapelle de Vaunavès – des photos de cette chapelle sur le site dignois.fr – et évite les deux premiers lacets de la route mais j’ai pris le second raccourci quasiment dans la pente et qui m’a fait bien suer : ce sont des galets roulants et mieux vaut emprunter la route si on n’a pas le pied sûr.
Le chemin passe derrière les maisons de Beaucouse [ndlr : suite au message d’un randonneur en 2017, le droit de passage derrière le château semble avoir été supprimé ; vous devez passer à l’est du château en partant du cimetière]. J’admire les constructions comme celle de droite, construites en galets arrondis puisqu’il n’y a que ça : les anciens savaient utiliser les matériaux trouvés sur place. Parfois c’est un village entier qui était construit en galets comme au vieux Bras d’Asse.
Je commence la longue et lente montée de la crête de Beaucouse par un sentier de galets fortement collés à la terre et piqué de touffes d’herbe : c’est plus rassurant que tout à l’heure. Je me retourne : déjà un paysage à couper le souffle du côté de la vallée des Duyes, et de Digne. Impossible de rater le pic d’Oise
-, en forme de pyramide parfaite et tacheté comme une peau de panthère.
Le Cousson, le Chiran et toutes les montagnes connues autour de Digne sont parfaitement identifiables. Le sentier est totalement à découvert : soleil et vent sont donc de la partie. Côté nord-est, la barre calcaire de Géruen et la cloche de Barles ; pourquoi cloche ? allez, devinez !
La montée continue avec une petite fenêtre vers l’ouest et la montagne de Lure ; quelques arbres enfin apportent un peu d’ombre. Le panneau que je guettais : il faut quitter le sentier menant à la crête de Vaumuse, pour celui de la chapelle, toujours en montée. Les planeurs survolent Vaumuse en émettant un léger sifflement. La chapelle Saint-Joseph de la Pérusse ne se découvrira qu’à la dernière minute, il est donc inutile de la chercher comme point de repère dans le paysage. Elle se mérite ; partie de Vaunavès à 734m, j’arrive à 1257m d’altitude soit plus de 500m de dénivelée.
Il y a du monde aujourd’hui ; sans doute à cause du 15 août. Je fais le tour de la chapelle, qui ne fut pas qu’une chapelle mais un ermitage, ce qui explique le nombre de pièces. A l’extrémité, une pièce à vivre est équipée d’un poêle, d’une table et de bancs de bois, d’une armoire ; beaucoup considère qu’il s’agit là d’un refuge (sans lit) : je dirai plutôt un abri en cas de mauvais temps.
La corde de la cloche traîne au sol et ceux qui partent n’hésitent pas à la tirer pour que retentisse très loin la sonorité claire de cette cloche de taille respectable.
La chapelle contient toujours les ex-votos qui ont fait la réputation et la ferveur des habitants des environs ; le brancard qui va supporter la statue de Saint-Joseph est prêt pour demain.
La fontaine, bien protégée derrière la porte de bois, garde précieusement un récipient pour récupérer l’eau ; lorsqu’on ouvre la porte, on découvre un bassin rectangulaire de taille impressionnante.
Un long banc bien calé le long du mur, à l’extérieur, invite au repos et au pique-nique : c’est là que je m’installerai, face au vallon des Plaines.
Le chanoine de Digne avait ramené de Rome une parcelle du pallium3 de saint-Joseph en guise de relique.
Il y avait tellement de personnes venues de Digne, Seyne, Sisteron, Gap,… lors des grands pèlerinages (les jours de Pentecôte, Fête-Dieu) que le curé était obligé de bénir les fidèles en plusieurs fois. Il y avait aussi des petits pèlerinages les jours de saint-Jean-Baptiste, saint-Pierre, de la Nativité, de la Sainte-Vierge. Pour l’occasion la statue de Saint-Joseph était placée sur un brancard au milieu de la chapelle ; les malades passaient deux ou trois fois sous le brancard en signe d’humilité.
Mais le plus surprenant dans ce ‘désert’, c’est la source abondante et pérenne qui s’y trouve.
Continuer la lecture de ** La chapelle Saint-Joseph de la Pérusse