** La villa romaine Saint-Pierre de Vence et le château de Roquemartine


Une randonnée très intéressante sur les hauteurs d’Eyguières. Une seule place pour se garer au plus près (croisement D569/Mas de Loc) ; vous pouvez partir de Lamanon, d’Eyguières, ou du parking près de la villa romaine, sur le chemin de Saint-Pierre en sens unique – avec de sacrées ornières selon la saison – dans le vallon des Glauges. C’est le choix de notre première visite.

Eyguières, son histoire féodale, communale et religieuse, Abbé L. Paulet, Marseille, 1901

Au vu d’un des premiers documents consultés, Des prospections à la fouille : recherches à Eyguières (B.-du-R.), Jean-Pierre Pelletier, Michel Poguet, Contributeur : F. Brien-Poitevin J. Lafaurie Y. Rigoir J. Rigoir, Revue archéologique de Narbonnaise, Année 1993, n°26, pp. 181-234, je constate que la commune possède beaucoup de témoignages de son passé : oppida, grottes, vestiges romains, castellas, chapelles, etc.

La villa romaine de Saint-Pierre de Vence se trouve au pied du mont Sainte-Cécile, à 500 m seulement du chemin où nous sommes garés. Saint-Pierre de Vence est le nom d’une ancienne communauté religieuse appelée ainsi de longue date.

L’origine de ce quartier, écrit Vanse sur la carte de Cassini, au pied du mont sainte-Cécile, nous renvoie à l’ordre de Saint-Ruf.
L’ordre est chargé de la direction de l’église Saint-Ruf d’Eyguières peu de temps après la création de l’Ordre (vers 1039 à Avignon). Celui-ci reçoit en donation de l’évêque d’Avignon Saint-Pierre de Vence et son église ruinée. Cet autre document – Les saintes de la messe et leurs monuments, Charles Rohault de Fleury, Libr.-Impr.réunies, 1893 – évoque Saint-Pierre-ès-Liens de Roquemartine.
Sainte-Cécile de Vence est mentionnée dans une bulle de 1096, confirmée en 1488 dans une bulle d’Innocent VIII.
Le tag ‘Vence ‘ du site Vous voyez le topo, me donne une idée de l’origine de ce toponyme, ni français ni provençal. Habité par les gaulois puis les romains, ce territoire a peut-être pris le nom romanisé d’un notable gaulois, celui de la villae, appelé Venucius… devenu Vence. Jusqu’à preuve du contraire…

Cette villa romaine construite au IVe siècle a été occupée jusqu’au Xe ; les monnaies découvertes à proximité en témoignent ; J. Lafaurie considère qu’il est extraordinaire qu’un même site fournisse tant de raretés aussi importantes pour sa chronologie. Eyguières (Bouches-du-Rhône). Saint-Pierre-de-Vence. Site occupé à la fin de l’âge du fer, thermes d’une villa gallo-romaine (IIe-Ve s.) et réoccupations durant le haut Moyen Âge (VIe-Xe s.). [compte-rendu], Poguet Michel, Pelletier Jean-Pierre, Archéologie médiévale, Année 1993, 23, pp. 326-327. Dans les niveaux inférieurs, un établissement plus ancien et même un habitat d’avant notre ère. Au XIXe ce que l’on a pris pour une tour est en fait un pan de mur toujours debout. Les installations 1 à 4 correspondent à un petit balneum, de 5 à 11 à un grand. Les salles se suivent, des bains chauds (6 : caldarium) aux bains froids (8 : frigidarium) en passant par les bains tièdes (7 : tepidarium). Les installations thermales gallo-romaines paraissent avoir été abandonnées, […] au cours de la deuxième moitié du Ve s. Un plan se trouve dans le document Des prospections à la fouille : recherches à Eyguières.
Les thermes romains expliqués aux enfants

Nous retrouvons le chemin par une voie romaine visible sur une vue aérienne. Le sentier passe au pied du mont sainte-Cécile puis longe la route D25 ; le nouveau château de Roquemartine a été reconstruit dans la plaine après la destruction du château féodal que l’on aperçoit au loin. Nous parvenons plus ou moins facilement à ne pas marcher sur la route D569 mais sur le bord, jusqu’au monument tronqué – assez rare en France – en hommage aux camarades tombés pour la libération de la région.

Ces éléments des monuments aux morts peuvent consister en une colonne de marbre de 2 à 4 mètres de haut franchement brisée en son extrémité haute, pour symboliser la vie trop tôt écourtée. Colonne brisée, Wikipedia

A partir de là, montée dans la pente, montée rude d’une centaine de mètres de denivelée dans les cailloux. Presque au sommet, le sentier toujours aussi caillouteux, se dirige vers le nord. Progressivement, avec une certaine émotion, se dévoile le château de Roquemartine perché sur son pic rocheux ; à ses pieds, l’église Saint-Sauveur dont les murs de belle taille paraissent en bon état.

La visite (dangereuse et en propriété privée) commence donc par l’église Saint-Sauveur, autrefois église paroissiale de la commune de Roquemartine rattachée à Eyguières depuis 1805. Nous y entrons par le sud mais au moyen-âge, on y accédait par l’intérieur car elle était adossée au rempart. Abandonnée depuis le milieu du XVIIe, elle n’a plus de toiture, les pierres jonchent le sol. Dans le chœur à voûte gothique de forme pentagonale irrégulière, je devine des peintures murales, effritées et défraichies. Autrefois, à côté de l’autel trônaient les statues d’Elzéar de Sabran et Delphine de Signes, tous deux saints. Eyguières, son histoire féodale, communale et religieuse, Abbé L. Paulet, Marseille, 1901
La travée ouest ayant été détruite anciennement, l’édifice est réduit de moitié. L’une des deux petites chapelles de plan rectangulaire conserve le caveau des seigneurs d’Albe, pillé en 1857 par une bande de brigands. En 1984, JM, restaurateur éclairé de vieilles pierres, découvre une fresque représentant la crucifixion. Merci à l’auteur Michel Morra, du blog lphdpa, d’avoir relaté les faits.
Les petites histoires du Pays d’Arles : la fresque oubliée de Roquemartine
40 ans plus tard, alors que la Fondation du Patrimoine (loto du Patrimoine 2022) vient de sélectionner le site pour un projet de fouilles et sécurisation, je serai curieuse de voir ce qui pourra être récupéré…

Le démarrage des travaux est prévue au premier trimestre 2022. Ils doivent se terminer un an plus tard, au premier semestre 2023.

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Plateau de Vitrolles, mare de Salvarenque


Après une petite visite dans le quartier de Salvarenque avec Anne, j’ai eu envie d’y retourner, étonnée de trouver une mare d’eau sur le plateau de l’Arbois, couvert d’une végétation typiquement méditerranéenne de garrigues à chênes Kermès où l’eau est rare. Je me gare à côté du radar, excellent repère sur le plateau, et qui sert au contrôle aérien de la zone d’atterrissage de l’aéroport de Marseille-Provence.

La météo ce jour à cet endroit :
Avec le vent et la température ressentie

Au loin entre deux arbres, la vue sur une partie des montagnes de la Provence vers l’est : Tête de l’Ost, Tête du grand Puech, Pilon du roi, l’Etoile.

Je suis partie du radar par une large piste en direction de Salvarenque, l’ancien chemin de Vitrolles à Aix. Au carrefour avec la piste menant à Magenta, une cabane de chasse, à moins que ce ne soit les ruines de la ferme de Bellevue isolée au milieu du plateau près desquelles s’est installé un renard roux.

Fin XIXe, la chaumière Bellevue est une campagne de chasse de 48000 m2 (poste à feu pour grives, ortolans, perdreaux, lapins) . Elle possède deux citernes, cultive oliviers, amandiers et arbres fruitiers. La maison d’habitation a 6 pièces.
Elle est mise en vente en 1883, peu de temps après sa construction puisqu’elle ne figure pas sur le cadastre napoléonien de 1831. Le Petit Marseillais, 18 juillet 1883

Accrochées sur la végétation basse, d’impressionnantes toiles d’araignée avec un tube au milieu où l’araignée se cache sans bouger. Un peu plus loin, à l’approche du vallon de Gourgoulousier1, une lavogne créée par l’homme est destinée à recueillir les eaux de pluie pour permettre aux troupeaux de s’abreuver. Mais ça sert aussi pour d’autres espèces…

Elle a attiré en 2020 les espèces suivantes : Ischnure naine, Orthétrum réticulé, Sympétrum à nervures rouges. Le résultat le plus marquant est l’utilisation de la lavogne dès sa première année pour la reproduction des Crapauds calamites, puis, l’année d’après par les Crapauds communs. Dès la première année, des reproductions de libellules ont été constatées Faune-paca.org n°69

Comment font les observateurs qui comptent les crapauds pour ne pas compter deux fois le même ? Je trouve qu’ils se ressemblent tous ; mais non, le motif dorsal est unique pour chaque individu et il varie peu dans le temps à l’âge adulte. La méthode :

Pour chaque individu repéré, le sexe est déterminé (présence ou non de sac vocal) et une photo est prise, bien parallèle au dos. Un recadrage de celle-ci permet de garder une image normalisée utilisable dans des logiciels de reconnaissance automatique. […] L’analyse des photos permet de reconnaitre si l‘individu a déjà été capturé auparavant.

Après le vallon du Gourgoulousier dont les abords verdoyants contrastent avec la sècheresse du plateau, j’arrive dans le quartier de Salvarenque planté d’oliviers. Après les immenses champs jaunis par le soleil, je trouve la fameuse mare de Salvarenque. Située sur un sol argileux, elle est alimentée par une résurgence de la nappe phréatique et par les eaux de pluie. Elle a un profil à double-concavité : une partie s’assèche en été – c’est le cas aujourd’hui – alors que l’autre peut rester en eau. Ce qui m’intéresse aujourd’hui, c’est de m’y poser et d’observer la vie animale.

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Boucle panoramique de la cave des vignerons de Martigues


La cave des vignerons de la Venise Provençale (= Martigues) me remet le petit guide de randonnée-découverte de trois boucles sur les sentiers vignerons. Comme il est tard dans la matinée, j’opte pour la boucle panoramique de 11 km. Des chiffres et des lettres en marron sur le guide papier illustrent les points d’intérêt ; en bleu, les points de repère sur le terrain. Le parking est tout trouvé : celui de la cave, route de Sausset, déjà plein quand j’arrive.

Il me faut parcourir 600 m le long de la D5 assez passante ; peu avant le feu, je reconnais saint Michel sur son piédestal, installé à côté du Clos Saint-Michel, quartier dans lequel une permanence de la police municipale est exercée. Quand on tourne à droite sur le chemin des Jardins, ça commence à aller mieux : on côtoie des vignes et je repère le A pour le cépage grenache.

Grenache : originaire d’Espagne, c’est le cépage emblématique des Coteaux d’Aix-en-Provence, vinifié principalement en rosé ; assemblé avec le Cinsault, il donne du rosé de Provence. Selon le guide p.6.
Un charmant sentier qui domine les vignes prend la relève après la dernière maison ; il grimpe puis se meut entre colline et vignes jusqu’au quartier des Jourdans ; je laisse à droite une ancienne ferme en ruines, son écurie et derrière son aire de battage  ; ce quartier rural de moins de 10 constructions en 1817, est aujourd’hui un quartier résidentiel. Je me trouve bientôt au point 3 où se détache la longue boucle de la Venise provençale (19 km).
Le point 3 se situe à  l’extrémité est d’un gisement de gypse s’étalant jusqu’au hameau de Saint-Pierre, exploité en souterrain jusqu’en 1989, déplacée à l’est de la D49 en 1985 ; à la fin de l’exploitation, certains étages ont été remblayés, certaines zones sujettes aux fontis1 sont clôturés Observatoire régional des risques en PACA, ancienne mine de Saint-Julien-les-Martigues. Les trois sondages à gauche du chemin ont déterminé que le toit de gypse serait à plus de 50m de profondeur ; rien de visible au point 3, pour moi c’est frustrant…
L’entreprise GEOSTOCK (GEOSEL aujourd’hui) souhaitait utiliser les  cavités de gypse pour y stocker des hydrocarbures comme à Manosque. Une étude du BRGM de 1973, avec une centaine de sondages, n’a pas pu assurer qu’ils pourraient être stockés à niveau variable. Etude du BRGM, mine de Saint-Pierre,1973
Pour en savoir plus sur le stockage d’hydrocarbures dans ces cavités : Les sentiers de Bellevue
Avant l’entrée dans les bois, je continue sur le chemin des Audibert qui coupe celui du Barquiou qui ramène directement à la cave par la boucle des cépages ; je coupe la D5 direction le Trou du Loup. Que de toponymes à base de loup en France ! et que de Trous du Loup : à Corbières (04), Salernes (83), un quartier à Ventabren (13), un autre à Villeneuve (04), etc.

Mars 2021 : un charnier de huit chèvres a été découvert au Trou du Loup. Ici pas de loup mais probablement une manière de se débarrasser de chèvres divagantes ; elles seraient 500 dans le massif de la Nerthe. En janvier, 3 autres sur la plaine d’Escourillon. Elles s’attaquent aux cultures.
Sur la route de la Côte bleue, six grands panneaux avertissent désormais les conducteurs du danger due chèvres divagantes pouvant traverser la route et provoquer des accidents.

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