Port-Miou


img_9928r.jpgIMG_9942r.JPGPetite randonnée découverte classique, touristique même, mais culturellement intéressante : des panneaux d’information nous expliquent l’origine des calanques, les animaux et plantes qui y vivent le mieux, l’épisode Saint-Exupéry qui se serait échoué non loin. Sa disparition au cours d’une mission de reconnaissance aérienne, en 1944, a suscité de nombreuses interrogations. L’affaire rebondit en septembre 1998, lorsqu’un chalutier naviguant entre Cassis et Marseille attrape dans ses filets une gourmette portant le nom de Saint-Exupéry, et des débris d’aluminium. Quelques aventuriers vont tenter d’identifier le numéro de moteur de l’avion tombé à l’est de l’île de Riou le 31 juillet 1944. Ils y parviendront  en 2003 (voir l’article de l’Express Saint-Exupéry, suite et fin).

chateau-port-miou-et-tremie.jpgNous sommes face aux installations de l’usine Solvay. Au début du 20ème siècle, la Société Solvay obtient l’autorisation d’exploiter le calcaire très pur des falaises rocheuses qui dominent la rive Nord de la calanque. Celui-ci était déversé directement sur les bateaux ancrés dans la calanque par des trémies encore visibles (voir carte postale), et transporté par mer jusqu’aux Salins-de-Giraud où il servait à la fabrication de la soude. Cette ville fut créée de toutes pièces en 1855 par Les Salins du Midi et le groupe chimique Solvay. On estime à 6 à 7 millions de tonnes la quantité de roche qui fut extraite jusqu’en 1982, date à laquelle cessa définitivement l’exploitation du site, lui donnant ainsi sa physionomie actuelle. Cassis, site officiel
img_9952r.jpgLa «pierre de Cassis» ou «pierre froide» a été utilisée dans l’antiquité et redécouverte en tant que pierre de taille vers 1728 pour la fabrication d’éviers, mais aussi des piliers de portails des riches propriétés et bastides des armateurs marseillais. Ces pierres de taille ont également servi à l’édification du socle de la statue de la liberté à New-York. Un détachement de bagnards de Toulon ont extrait les blocs sur la presqu’île au XIXème siècle. L’époque des bagnards n’est pas si lointaine : je me souviens en avoir connu un lorsque j’habitais à Cayenne (non loin du bagne d’ailleurs…) ; il habitait dans une cabane de jardin et venait parfois nous rendre visite ; il était nourri en échange de quelques menus travaux ; il purgeait sur place une peine égale à celle de son emprisonnement (principe de la double peine). Vu son âge, il n’avait aucune chance de rentrer un jour dans son pays.

img_9585r.jpgLes archives de la ville de Marseille mentionnent, en 1783, une demande d’autorisation de four à chaux dans la Calanque de Port-Pin, chaux qui a servi de liant au ciment de la construction des murailles du fortin au cap Morgiou (photo ci-contre). Ce cap est un objectif de balade sublime, qui domine la grotte Cosquer. Soit dit en passant, un panneau d’information de ce circuit de découverte prête à confusion : la grotte Cosquer se situe sur le territoire de la commune de Marseille et non Cassis.

Le plus spectaculaire c’est sans doute la présence d’une source sous-marine (exsurgence) qui arrive dans la calanque et qu’on peut observer sur l’autre rive. « … sur le flanc ouest de la calanque de Port-Miou, la rivière débouche en mer à environ 12 mètres au-dessus du niveau de l’eau. Son débit varie suivant la pluviométrie locale de 3 à 100 m3/seconde. Deux grandes entrées, distantes d’une vingtaine de mètres, sont praticables, l’une est empruntée par les canalisations des boues rouges de Gardanne. La sortie de ce grand fleuve souterrain img_9934r.jpgsemble connue depuis IMG_9940r.JPGla nuit des temps. » Pour tenter de récupérer cette eau douce, un puits artificiel de 45m de profondeur est creusé (visible depuis l’autre côté de la calanque) et un barrage artificiel est mis en place pour empêcher l’eau de mer, pendant les marées, de se mélanger à l’eau douce provenant de la source. Le barrage sous-marin, situé à 500 m de la résurgence, est traversé par 4 conduites. Actuellement, 3 conduites sont condamnées pour le bien de l’étude hydrogéologique menée par le Centre d’Etude du Karst et la Société des Eaux de Marseille. Toutefois, les plongeurs souhaitant traverser le barrage en ont encore la possibilité en empruntant la conduite de 1m de diamètre située la plus à gauche quand on vient de la mer.

gilli_riviere_souterraine_port_miou.jpgCe barrage sera un échec, l’eau douce étant toujours mêlée à de l’eau de mer. Depuis peu l’explication a été trouvée grâce à Gilli : c’est un puits profond et éloigné des côtes qui communique avec la mer (voir schéma).

Le Figaro, la source sous-marine est exploitable
Les découvertes de Gilli (avec photos du barrage, de la source visible au niveau de la mer)

Grâce à de nombreuses plongées successives, la galerie souterraine a été explorée de plus en plus loin à l’intérieur des terres.

  1. En 1953, J. Blanc, J. Picard et M. Galerne explorent les premiers mètres de la galerie
  2. A la demande de la société des eaux de Marseille, […] les plongeurs-spéléos de Marseille (G.E.P.S.) entre 1968 et 1972, poursuivent jusqu’à 1020 m. La rivière souterraine de Port Miou (article d’un quotidien, 1968)
  3. De 1972 à 1974, ces études permettent le creusement d’un puits artificiel et la construction d’un barrage.
  4. Le 12 juin 1993 : le développement est porté à 1700m depuis le barrage soit 2230 m depuis la mer pour 147 mètres de profondeur. La progression jusqu’au terminus a duré 60 minutes, soit une immersion de 11 heures et 2 minutes.
  5. En novembre 2005, Jérôme Meynié, assisté par Jean-Luc Armengaud, atteint la profondeur de -172m dans le puits terminal.

IMG_9944r.JPG« Ce réseau fabuleux et gigantesque, les plus grandes galeries noyées d’Europe, a été créé à l’air libre au Quaternaire, lorsque le niveau de la mer se situait à 120 m au-dessous de son niveau actuel, phénomène qu’a connu la grotte Cosquer, distante d’environ 8 km. Le conduit principal présente une section impressionnante de 200 à 400 m2, pour une profondeur moyenne de 20 mètres, jusqu’au barrage de la SEM, à 530 m de la mer ».

IMG_9937r.JPGLe parcours continue avec la découverte de la chapelle de Port-Miou, dite chapelle de Santé (ou Notre Dame Bon Voyage). Drôle de nom pour un chapelle mais elle est dédiée à Notre Dame qui aurait miraculeusement sauvé les habitants de Cassis de la peste de 1720. Alors qu’on compte 40000 morts dans toute la Provence (voir le mur de la peste dans ce blog), et plus de la moitié à Marseille si près de Cassis, on peut se demander comment les cassidains ont pu échapper à ce fléau…

Après avoir trouvé les réponses aux énigmes, réponses figurant toutes sur les panneaux d’information, nous trouvons la cache Notre Dame La Santé par l’équipe rabatau : c’était une courte mais bien agréable manière de découvrir ce lieu.

Itinéraire presqu’île Cassis 2km, 1h 20m dénivelée – à compléter avec une randonnée à la pointe Cacau ou à la calanque de Port-Pin

La calanque de Marseilleveyre


contre jour sur les îlesbatterie Estéou de Bouqueimg_0064r-300x224.jpg

img_0065r-224x300.jpgimg_0045r-224x300.jpgimg_0051r-224x300.jpgimg_0069r-224x300.jpgimg_0072r-224x300.jpg

Facile d’accès, point de ralliement de nombreux marseillais, même l’hiver par grand vent comme aujourd’hui 27 décembre, la calanque de Marseilleveyre est accessible par le sentier de la douane depuis la calanque de Callelongue. C’est aussi la fin de la route. Au large, l’île Maîre est suivie de ses deux enfants : les deux pharillons. Avec un peu d’attention, vous devriez pouvoir retrouver à Callelongue ou au cap Croisette quelques vestiges du téléscaphe de Callelongue (large roue).

Cabine du télescapheUne curieuse invention (1967) : le téléphérique sous-marin entre Callelongue et le cap Croisette

Images d’archives télévisées sur le télescaphe, ORTF, Les coulisses de l’exploit, août 1969

(Image empruntée au site du Vieux-Marseille)

En quelques petites descentes et montées sur les pierres patinées, nous contournons le rocher des Goudes ; après quelques coups d’oeil sur les îles aux formes si caractéristiques, nous découvrons l’ancienne batterie de l’Estéou1 de Bocque (quel drôle de nom pour cette batterie napoléonnienne !) déclassée depuis 1871 avec son vaste mur en forme d’arc de cercle ; sans doute est ce là l’origine du surnom moderne de ‘Théâtre’ que l’on voit sur la carte des calanques.

En consultant le cadastre napoléonien de la ville de Marseille de 1820 (25ème section, Z7), je m’aperçois que les noms donnés aux lieux n’ont rien à voir avec ceux d’aujourd’hui ; les calanques n’étaient probabalement fréquentés que par ceux en charge de la protection de nos côtes : le sentier de la douane s’appelait le chemin de la batterie de Marseille Veire ; la calanque de Marseilleveyre s’appelait la calanque de la batterie de Marseille Veire ; selon moi, la batterie s’appelait plutôt Estéou de Bouque2 (et non de Bocque) ce qui signifierait Ecueil de l’embouchure vu que son but était d’empêcher les corsaires de débarquer à l’embouchure de la Calanque Longue. Les majuscules n’auraient d’autre justification que de désigner un nom de lieu.

Cadastre napoléonien 1820 - section 25 - Z7

Batterie Est de Marseilleveyre du site Index de la Fortification française 1874-1914

Le 4 janvier 1794, Bonaparte écrit au ministre de la guerre sur les fortins de Marseille : « Toutes les batteries circonvoisines qui défendent la rade sont dans un état ridicule. L’ignorance absolue de tous les principes a présidé à leur traçé. Elles ne sont pas en état de soutenir une bordée » et « Le 7 janvier 1794, Napoléon Buonaparte, général de brigade d’artillerie, se vit confier par le Comité de Salut public le commandement en chef de l’artillerie de l’armée d’Italie, ainsi que de l’armement des côtes de la Méditerranée […] Au cours des mois de janvier et de février 1794, […] il fit avec sa famille plusieurs déplacements pour déterminer la position des diverses batteries à établir pour la défense du littoral méditerranéen ». La Batterie de Cap Croisette, en 1811, est en mauvais état, une nouvelle batterie des Croisettes est décrétée par Napoléon […] elle croise le feu […] à l’Est avec la batterie de la Mounine pour empêcher le refuge ordinaire des corsaires ennemis à l’anse de Callelongue à 800 mètres à l’est. Extrait de Marseille-forum

Après l’étroite calanque de la Mounine, un mouchoir de poche qu’il faut conquérir l’été en arrivant tôt, c’est celle de Marseilleveyre dominée par quelques cabanons vides en cette saison. L’horizon est barré par l’ïle de Jarre, celle où avaient lieu les quarantaines, et Riou au large de laquelle le Lightning F-5B de Saint-Exupéry a été retrouvé en 2003 par des plongeurs audacieux et tenaces (Saint-Exupéry, suite et fin, article de L’express du 21 juin 2004). Après la cache de rabatau Balade dans Marseille – la calanque du Belge, prétexte à cette promenade, nous rejoignons la guinguette du belge (son léger accent en témoigne) dans la calanque de Marseilleveyre ouverte tous les jours de l’année ; une dizaine de chats abandonnés par les vacanciers et adoptés par le propriétaire, s’installent au chaud sur et sous les tables ; la terrasse est prête à accueillir les nombreux clients que nous croiserons sur le chemin de notre retour : ce midi, ce sera pâtes et côtes de porc !

img_0080r.jpgAu retour, nous empruntons la variante à points noirs vers le col du sémaphore. Dominant à la fois Riou et le Frioul, les farots de Marseille sont les ancêtres des sémaphores construits pour avertir Marseille de l’arrivée de navires ennemis. Celui qui domine Callelongue daterait de 1791 ; c’était un poste de guet chargé de surveiller les approches maritimes ; le Génie de Napoléon III revoit le système défensif à partir de 1864 qui se composera, entre autres, des sémaphores de la Ciotat et de Callelongue (source Stokofish : forum-Marseille) : il signalera par signaux optiques toute activité ennemie ; de par sa position stratégique, il a été occupé par les allemands pendant la seconde guerre mondiale. Il est aujourd’hui désaffecté. Après une longue descente dans les graviers, nous atteignons la calanque de Callelongue dont les parkings sont maintenant pleins.

Itinéraire Callelongue – Marseilleveyre – 5.100km – 2h10 de déplacement – dénivelée 88m

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1Estèou : selon Marius Autran Récif, écueil, roche voisine des côtes ; selon le dictionnaire de la Provence et du Comtat Venaissin de Claude François Achard, 1785, rocher contre lequel les vaisseaux vont échouer.

2bouque : selon le même dictionnaire, de l’ancien provençal boùque qui voudrait dire bouche, ouverture, embouchure

*** Le sentier de la chaîne à Moustiers


IMG_9167r.JPGMoustiers (Sainte Marie depuis 1847 pour se différencier des autres Moustiers) est un des plus beaux villages de France, rassemblant plein de lieux charmants et différents :  un dédale de ruelles chevauchées de voûtes ou d’arcades, une rivière qui dégringole en cascade, une chapelle haut perchée à laquelle on accède comme autrefois par de nombreuses marches, une étoile dorée suspendue entre deux rochers bien au-dessus de nos têtes, des artisans qui travaillent la faïence comme autrefois, des placettes qui vous accueillent à l’ombre des arbres,… Et je ne vous parle pas des environs : le lac de Sainte-Croix et ses loisirs nautiques, le Verdon et ses randonnées sportives mais inoubliables, la colline de Costebelle devenue une île depuis la mise en eau du lac de Sainte-Croix.  Nous passons à l’office du tourisme pour nous informer sur le sentier de la chaîne qui permet d’aller toucher l’ancrage de celle-ci et faire un voeu. Celui qui parvient jusque là haut le mérite bien. Nous sommes prévenus : mieux vaut être en forme, « le parcours est sportif et aérien« , certains passages sont techniques et le final ressemble plutôt à de l’escalade.

La météo aujourd’hui à cet endroit
Avec la température ressentie

IMG_9171r.JPGIMG_9174r.JPGIMG_9181R.JPGIMG_9183r.JPGIMG_9186r.JPG

La balade commence par la calade de la montée des (7) oratoires, bien polie par le passage répéré des pèlerins et visiteurs : 262 marches à flanc de colline. Ces sept oratoires ont fait place en 1860 aux quatorze stations du chemin de croix, ornés bien plus tard de décors en faïence réalisés par Mlle Simone Garnier. L’oratoire de Blacas est le plus vieux que j’ai pu rencontrer depuis que je fais de la randonnée ; il date du XIVème siècle et l’étoile à 16 rais ornait les armes de la famille Blacas. Nous visitons la chapelle notre Dame de Beauvoir (autrefois appelée Notre Dame d’Entre-Roches) avec son clocher en tuf et son porche finement sculpté. fleur_moustier.jpgA l’intérieur, deux grands vases en faïence de Moustiers du XVIIIème, trônent de chaque côté de l’autel. En sortant de la chapelle, le contraste entre les toits du village sous le soleil et l’ombre fraîche, nous surprend : difficile de réusssir la même photo que celle des cartes postales.

Les Moustiérains se rendent chaque année depuis le XVIème siècle en procession le samedi près Pâques, en hommage à Notre-Dame-de-Miséricorde qui sauva la communauté de la peste. Ils ont pris plus tard une forme particulière puisqu’on y amenait les enfants morts-nés, pour les faire ressusciter le temps d’être baptisés. Après quoi, ils pouvaient être inhumés religieusement. Les chapelles reconnues pour ce genre de miracles sont appelées chapelles à répit. Notre Dame de Beauvoir est l’une des rares de ce genre en Provence.

IMG_9188R.JPGIMG_9190R.JPGNous franchissons la seconde porte fortifiée qui mène au ravin de Notre Dame ; la montée est parfois abrupte. De là haut, je mesure la hauteur de cette large crevasse reliée par la célèbre chaine. Hésitations à la croisée des chemins. Petite montée en escalade sur une paroi rocheuse puis dans une cheminée : aucune appréhension de la part des enfants qui descendent avec leurs parents. Sur le plateau, nous cherchons le sentier de la chaîne. Une jeune fille nous double d’un pas léger tandis que IMG_9199R.JPGnous hésitons dans les éboulis entrecoupés de passages rocheux. Après cette belle descente, il faut escalader maintenant la dernière paroi rocheuse : pas de crochet pour s’aider. Tout là haut, j’en oublie quelques instants que je suis venue chercher la  cache Blacas Star de patrick chirac 83. Je domine la plaine ; en observant la chaîne par dessus le ravin, j’en ai presque le vertige (mais comment au Moyen-Age ont-ils donc installé cette chaine entre les deux parois rocheuses ?…) ; une plaque commérative à peine visible nous rappelle la date de la pose de la chaîne, et sans doute le nom de celui qui l’a offert à la ville (1882, Baptistin Moussu ?) ; je n’hésite pas à toucher l’ancrage de taille impressionnante mais je ne vous dévoilerai pas mon voeu ! (photo ci-dessous Ti’Mars…)

Randomania Plus vous dit tout sur l’étoile de Moustiers

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