** Le Haut Montsalier, village abandonné


Les villages abandonnés m’attirent, je ne sais trop pourquoi. Quand certains ne retiennent que la beauté du point de vue dominant, quand d’autres cherchent des trésors oubliés par les habitants exilés ou volent même les croix dans le cimetière, moi, je me complais à faire un retour arrière. J’imagine la vie rude d’autrefois à transporter les marchandises avec un âne, à cultiver puis battre le blé ; j’admire le courage de nos ancêtres souvent obligés de travailler dur, juste pour se nourrir. Le livre de Florence Dominique, par ses informations historiques, m’y aide bien d’ailleurs. 25 balades sur les chemins de la pierre sèche, Florence Dominique, Le bec en l’air, 2010

La météo ce jour à cet endroit :
Avec le vent et la température ressentie

IMG_0143.JPGNous partons du Plan de Montsalier, où les habitants se sont installés après avoir quitté les hauteurs au début du XXè siècle. Montée régulière dans un sous-bois de chênes. Nous longeons des murs de soutènement faits de grosses pierres arrondies bien disposées. Sous la falaise, les vestiges de murs délimitant l’enceinte du village précèdent le carrefour de chemins de Montsalier à Banon, Redortiers, Revest.

IMG_0145.JPGIMG_0147.JPGDeux des anciens moulins à vent sont des tours rondes – et on comprend mieux un jour de mistral pourquoi il y en avait trois ici ; je suppose que les habitants des villages voisins devaient y amener leurs grains. Le plus éloigné du village, près de la propriété habitée, est déjà plus sophistiquée. En 1829, sur le cadastre napoléonien, deux moulins (le meunier est COMBE Louis, 60 ans) sont signalés le long du chemin des pierres, preuve de l’importance des cultures céréalières. Le linteau de l’un d’eux, lorsqu’il était encore en place, portait la date de 1591. Ils fonctionnaient encore en 1860. Mais le plus ancien existait avant cette date puisque l’abbé Corriol écrit que Vincent Eyroux « le vieulx », marchand de Simiane, le 15 février 1578, achète un moulin à  vent à Montsalier.

IMG_0153.JPGNous prenons au nord le chemin de Redortiers. Champ de pierres ou champ cultivé ?  les feuilles et tiges vert foncé de cette plante sont couvertes d’un léger duvet blanc, et poussent à ras du sol, entre les pierres : serait-ce le concombre d’âne connu sous le nom scientifique d’ecbalie élatère ?

IMG_0155.JPGIMG_0161.JPGAvant le champ en friche, nous cherchons la grande bergerie à trois coupoles bien cachée dans le sous-bois. Chacune des coupoles est montée sur arcs diaphragmes comme celles de la montagne de Lure. Deux enclos, un devant, un derrière, la ceinturent. Quel dommage qu’elle ne soit pas réparée ! sous peu la voûte va s’écrouler.

IMG_0172.JPGIMG_0166.JPGDevant la cabane insérée dans le clapier, nous tombons en admiration sur l’épierrement en tous lieux réalisé par nos ancêtres. D’ailleurs, ici les flancs de collines, les cabanes, les murs, les maisons, les marches, les sols, ne sont que pierres ! au milieu d’un champ, de loin, une élégante cabane de pierres sèches nous invite à la pause : jardin clos, cabane fort joliment assemblée, rustique maison de campagne.

IMG_0174.JPGIMG_0184.JPGNous montons jusqu’au vieux Montsalier perché à plus de 910m d’altitude, par une large voie caladée faite pour le pas des ânes plutôt que pour celui des hommes. Points de vue sur les moulins et la montagne de Lure en toile de fond. L’église Saint-Pierre  est le seul monument restauré au milieu de ruines : hauts pans de murs, vestiges de caves voûtées réservées au bétail : sentiment contradictoire, comme si on voulait maintenir la vie à côté de la mort. Sur la place, la croix de mission rappelle l’époque où l’on tentait de restaurer la foi religieuse dans les villages.

IMG_0185.JPGL’abside est percée d’une fenêtre typique du XIè en meurtrière avec un tout petit linteau échancré. L’église parait curieusement obscure mais il est possible qu’il y ait eu une fenêtre ou deux, dans le mur sud, avant la construction d’un appentis. La Haute-Provence monumentale et artistique, Raymond Collier, Digne, 1986

IMG_0179.JPGExposées au vent, les grandes aires de battage en belvédère au dessus du vallon de la Royère, sont revêtues d’un pavage en calade soigneusement appareillé avec des raidisseurs2. Les aires caladées, c’est-à-dire pavées de pierres, étaient plus coûteuses, mais dégageaient moins de poussière et demandaient moins d’entretien. Les raidisseurs assuraient la cohérence de l’ensemble et sa stabilité. IMG_0182.JPGLes gerbes de blé, disposées verticalement en épis serrés, y étaient séchées au soleil. Les chevaux, guidés par un pautrier3, piétinaient le blé sec de façon circulaire. Puis les hommes frappaient les épis au fléau pour en faire tomber le grain. Tout le système de murs de passage et délimitations a été restauré par l’APARE en 2007 et 2008. Voir cartes postales anciennes et illustrations d’une aire de battage sur le site cugistoria.fr

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Sentier des plaideurs, crête par le GR9, pic des Mouches, col des Portes


IMG_9791.jpgA la montée, le sentier des plaideurs balisé de vert était pratiqué au XVIIIè par des villageois se rendant chez le juge de paix de Vauvenargues depuis Puyloubier. Parcours agréable, le plus souvent protégé des rayons du soleil mais assez fatigant, avec des descentes et montées successives et quelques passages T2 (ressauts rocheux faciles et exposés demandant un minimum d’attention). La descente plus courte et rapide balisé de rouge part du pic des Mouches, point culminant de la che, et rejoint le col des Portes. Entre les deux, un passage en crête difficile et non surveillé. La dénivelée est assez importante puisqu’on part à 400m d’altitude pour arriver sur la crête à 1100m mais le circuit offre de multiples et ioses points de vue sur la Ste-Victoire.

La météo à cet endroit
avec prévisions à 3 jours

IMG_9794.jpgIMG_9798.jpgAssez rapidement, un coup de fusil retentit. Est-ce déjà l’ouverture de la chasse ? deux autres coups suivent ; je regrette de ne pas avoir choisi une tenue colorée : certs enfilent même le gilet jaune obligatoire qui se trouve dans leur voiture.
Vingt minutes après le passage dans le ruisseau de l’Infernet, commence véritablement l’ascension de la Ste-Victoire : Col de Subéroqueaprès quelques passages escarpés, parvenue sur une zone de rochers dégagée, je perds le balisage vert. Heureusement, un autre randonneur habitué du parcours vient à mon secours et me guide du haut d’un rocher surplombant. J’atteins le col de Subéroque à 932m d’altitude.

IMG_9800.jpgBrèche de GentyDirection le col de Vauvenargues ; le parcours s’éloigne de la crête, face nord. Après la brèche de Genty et sa curieuse pyramide de pierre, je passe le col de St-Ser ; je descends nettement sous la crête avec plusieurs passages d’escalade dont deux avec ches. Encombrée par mes bâtons de randonnée qui m’avaient bien aidée jusque là, je ne sais comment les accrocher au sac à dos. Col de St-SerPassage avec cheJe m’adresse à un randonneur étranger qui vient d’arriver sur les lieux ; il ne comprend rien, s’installe confortablement pour un moment de repos et je dois donc me débrouiller seule. Après 5 bonnes minutes, après avoir repéré où je poserai les pieds, je descends au bas des rochers. Le parcours continue lentement : les marques sont peu visibles, les cairns rares et les franchissements rocheux assez pénibles. Plusieurs fois, je ferai demi-tour pour repérer les marques du GR (blanc-rouge) parfois plus visibles dans l’autre sens.
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Les boules de Saint-André de Rosans


Balade courte mais surprenante, un petit voyage de 110 millions d’années, dans un paysage lunaire et surréaliste, sur le Serre d’Autruy, d’accès privé mais toléré alors sans hésitation, nous y allons. J’en avais entendu parler depuis plusieurs mois par Ti’Mars… et par le blog d’Irna.

Peu avant d’arriver dans le village, intrigués, nous passons devant un immense site entièrement clôturé et surveillé à l’entrée duquel une pancarte nous informe sans rassurer vraiment. Il s’agit d’un site de traitements de déchets ultimes non dangereux géré par le SMICTOM (Syndicat Mixte Intercommunal de la Collecte et du Traitement des Ordures Ménagères). « Les déchets ultimes sont ceux situés en bout de chaîne de traitement, c’est-à-dire que leurs caractères polluants ou dangereux ne sont plus à même d’être réduits davantage. De la même manière, leurs parts valorisables ne sont plus économiquement et/ou techniquement extractibles ». J’en déduis donc qu’ils peuvent encore polluer mais que l’homme ne sait pas encore les rendre totalement inoffensifs…
Visite d’un CTDU à Lesménils (instructif)

Un projet d’extension de ce site de stockage de Sorbiers est envisagé pour un coût de plus de 2 millions d’euros HT. Son sort est en suspens. C’est un habitant de Montjay qui s’oppose à l’extension du site : il a déposé 17 recours, seul le dernier n’a pas été rejeté.
Le Dauphiné, 20/09/2009

La météo à cet endroit
avec prévisions à 3 jours

IMG_9719.JPGIMG_9720.JPGLa localité de Saint-André-de-Rosans se signale par une autre curiosité sédimentologique connue sous le nom de boules de Rosans. Un beau spécimen trône d’ailleurs sur la place du village, d’autres servent de décoration dans les jardins. Nous nous garons sur le côté de la route, ouvrons et refermons soigneusement la barrière, longeons le champ avant d’arriver sur une immense surface sableuse parsemée de boules. IMG_9747.JPGNon, ce ne sont pas des oeufs de dinosaures ! IMG_9723.JPGPas toujours en forme de boules mais parfois de forme ovoïde, ou ressemblant à des tortues qui sortent la tête, à des carapaces coupées en leur milieu.

Sur le plateau de grès, parfois en dallage, les boules semblent progressivement perdre les différentes peaux de pierre qui les protègent : IMG_9754.JPGcomme si on les épluchait ! leur couleur est souvent plus soutenue mais il s’agit bien de la même roche que celle qui les accueille.

IMG_9735.JPGDans ces mêmes grès, toute une série de décorations, sous forme d’auréoles colorées, apparaissent à l’oeil attentif,  « liés à la circulation de fluides dans la roche et formés par la diffusion et la précipitation d’ions métalliques ». De petites concrétions métalliques de taille centimétrique se déchaussent parfois de la roche, laissant leur empreinte derrière elles. D’après le blog d’Irna

Sur le flanc de la falaise au contraire, les boules sont fichées dans la paroi tels des boulets de canon. Vous pouvez même en voir le long de la route. Mieux protégées de l’érosion, de surface lisse, elles émergent de la paroi, et finiront sans doute par tomber. Le phénomène ressemble à celui des boules de Buoux dont je vous avais parlé dans la boucle des Esconfines.

IMG_0012.jpgIMG_9738.JPGIMG_9741.JPGIMG_0015.jpg

Le banc de grès […] s’est formé il y a un peu plus de 110 millions d’années. A cette époque, toute la région de Saint-André se trouvait sur les pentes d’une fosse sous-marine.  Cette pente sous-marine recevait une sédimentation intense essentiellement sous forme de marnes. Mais il s’y produisait aussi régulièrement des épisodes plus turbulents, sous forme d’avalanches et de glissements de terrain sous-marins, amenant localement, […] des dépôts massifs de sédiments plus grossiers. C’est un de ces épisodes, une avalanche sableuse ayant rempli les chenaux creusés dans les marnes sous-jacentes sur près de 50 kilomètres de long, qui est à l’origine des grès de Saint-André de Rosans.

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